Le Soleil est un con II.

La poule aux oeufs de sang.


[ J'étais allongé. Bleach en guise de lecture. Un de ces jours où l'on ne sait pas trop ce que l'on doit faire. Parce qu'on se remémore des souvenirs ... marquants. Je regardais les pages, plus que je les lisais, me souvenant de la venue au monde de ma petite soeur, qui devait être comme moi, faite pour remplacer. Je tournais la tête vers l'espace qui aurait du accueillir mon lit. Avec un pincement au coeur, je refermai la porte coulissante de mon placard. J'étais dans le noir le plus complet. Un noir où l'on est tout, et où l'on est rien. Souvent, les deux sont liés. C'était le cas. Quelqu'un s'approcha, ce devait être ma petite soeur vu la légèreté de ses pas.

" Elian ? "

Sa voix trahissait quelque chose. Elle avait fait quelque chose qui ne fallait pas. Si je ne faisais rien, ce serait peut-être son tour. Un jour ... Mais pour l'instant, c'était mon tour.

" Qui a-t-il ? "

Elle ouvrit la porte du placard, dévoilant mon petit endroit à moi. Juste mon coin rien qu'à moi. Un endroit où je ne risque rien. Un endroit où personne ne vient, sauf ma petite soeur, quand elle veut me parler de lui.

" Je peux entrer ? "

La question était dénuée de sens puisqu'elle avait profité du mouvement de l'ouverture pour se glisser et s'asseoir. Personne ne voulut croire que je faisais parti de ma famille avant. Lorsque j'étais en primaire, j'avais les cheveux noirs et les yeux très clairs, ils étaient bleus, mais se mêlaient de gris parfois. Il y avait un contraste saisissant entre mon père, ma mère à l'époque, et moi. Ils étaient blonds et avaient les yeux marrons.

" Elian ... lui ... il était comment ? "

J'avais donc raison, c'était bien de lui dont elle voulait parler. Lui ... Le point de départ de tout. De toute ma vie. S'il pouvait savoir à quel point je lui en ai voulus ! S'il savait à quel point je m'en veux de lui en avoir voulus ... Tout serait beaucoup plus facile s'il était là.

" C'était quelqu'un de très gentil ..."

Pincement de coeur.

" ... il a toujours été là, pour me soutenir. On se chahutait beaucoup lui et moi. Il voulait que je devienne fort. "

Nouveau pincement au coeur.

" Il jouait très bien au foot ... "

" Comme Zidane ? "

La question me surprit. Je n'avais pas prévu ça. Ma soeur venait de me prendre un peu au dépourvu. Je trouvais cette question tellement déplaçée ... Mais en même temps, elle était ... légitime.

" ... Oui, comme Zidane ... Il était presque comme ... un guide pour moi. C'était quelqu'un d'intéressant. "

C'en était trop, une larme roula sur ma joue. Puis sur la sienne. Elle se mit à pleurer en silence. C'était un spectacle triste. Je la regardai pleurer sans émettre le moindre son, je fus pris de nausées. Je me souvins de ma réaction lorsqu'il s'écroula. Lorsque le médecin nous affirma qu'il n"y avait plus rien à faire. Lorsque mon père l'apprit. La première nuit. Puis la seconde. Et celles du premier mois. Et celle du premier anniversaire sans lui. Et celles qui suivirent.

" Sandra, il faut toujours aller de l'avant. C'est ça qu'il t'aurait dit. Et puis il t'aurait chanter quelque chose. "

Elle leva les yeux sur moi. Son visage paraissait fatigué. Des larmes avaient mouillé ses joues, ce qui les faisait luire à cause des rayons du soleil.

" Oui ... Je ne suis pas aussi bon chanteur que lui, mais



C'est maman qui lui chantait ça quand il était petit. Il l'a appris et quand je n'arrivais pas à dormir, il me la chantait inlassablement. "

Soudain, j'entendis du bruit. Un bruit de pas lourd. Mon père n'était plus. L'Homme avait prit le dessus. Il ouvrit la porte de ma chambre avec fracas. Il me cherchait des yeux et vit la porte de mon placard ouvert. Il aperçut aussi ma soeur, qu'il fit sortir avant de claquer la porte. Il me fit sortir aussi, mais seulement du placard. Je pouvais lire une franche colère dans ses yeux, mais le reste de son visage ne laissait rien paraitre. L'Homme plaqua sa main sur mon visage pour l'entrainer contre le mur le plus proche. L'Homme était très rapide. Il approcha son visage du miens :

" Rechante une seule fois cette chanson et fils ou pas, tu tomberas. Cette fois-ci, tu ne t'en relèveras pas. Cette une promesse. "

Il jugea bon de me rappeler à quel point mon frère fut et restera un meilleur fils avant de me rouer de coups et me laisser allonger sur la moquette feu blanche, désormais rougeâtre. Ma lèvre inférieur était fendue.

La Femme entra avec un déhanchement presque félin. Elle posa sur moi ses yeux bruns et me caressa la joue avant de déposer juste devant moi un oeuf en chocolat, petit, mais bel et bien présent. ]